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Théophile Peris

Le grand feutre | 2021 | Aurélien Mole

Le grand feutre | 2021 | Aurélien Mole

Toison d’or | 2022 | Pierre Antoine Studio

Cantonnier | 2022

Vue d'atelier, résidence au CIAPV | 2022 | Théophile Peris

Né en 1997 à Moncrabeau (Lot-et-Garonne).

Vit et travaille ici et là.

Diplômé de l’École européenne supérieure de l’image de Poitiers.

Au gré de ses pérégrinations, Théophile Peris fait des rencontres humaines, paysagères, animales. Elles lui inspirent l’usage de matières brutes, qu’il s’attache à transformer manuellement dans des formes plastiques variées. Chaque œuvre est le produit d’une observation, d’un moment donné et circonstancié, comme autant d’interprétations sensibles de ces rencontres.

Dans le lit d’une rivière du Lot-et-Garonne, il prélève de l’argile affleurante, la travaille et la transforme en céramique. Coulant dans ces heaumes-fontaines en terre-cuite, la cascade lui traverse alors littéralement la tête. Aux environs de Clermont-Ferrand, il entend parler d’une source de bitume pur. Il part à sa recherche, et, une fois qu’il l’a trouvée, en récolte un bidon, qui attendra d’être utilisé plus tard.

Partout où il passe, il tisse des liens avec des éleveur.euses de moutons et récupère des ballots de laine odorante, encore grasse du suint des bêtes. La laine est ensuite valorisée selon la chaîne de transformation classique du feutre : triage, cardage, lavage, teinture, foulage, rinçage.

Mû par un désir insatiable d’apprendre, Théophile Peris s’est formé à ce savoir-faire artisanal, originaire d’Asie centrale, par des recherches théoriques, par tâtonnements et en expérimentant les différents outils et techniques traditionnelles – mais aussi grâce à l’immersion qui le porte de foyer en foyer, et de création en création. Chaque feutre répond au contexte dans lequel il a été créé, l’artiste respectant les temporalités propres aux lieux d’accueil, se nourrissant des conseils et des anecdotes que chacun·e se sent libre de partager. Le travail du feutre est une aventure collective : par le labeur et les étapes physiques multiples qu’il implique, par le poids et les quantités des matériaux à manipuler. Théophile Peris s’entoure souvent d’ami·es pour le réaliser. Le temps est patiemment pris pour chaque geste, et chacun·e participe selon son envie ; l’attention est portée sur la fabrication des objets qui nous entourent, à rebours des standards de productivité et de spécialisation.

Aussi important que soit l’apprentissage pour l’artiste, la transmission fait également partie intégrante de sa démarche. Aux contacts de publics scolaires par exemple, la co-création lui permet de faire passer des messages sur l’impact inévitable de toute action humaine, et de montrer l’imbrication de toutes les étapes dans un processus de transformation : de l’extraction végétale de la couleur pour une teinture, jusqu’à la consommation d’eau pour agglomérer et entremêler la laine.

Il veille à ne pas opposer, à ne pas créer de dichotomie entre le naturel et l’artificiel, entre le manufacturé et l’industriel, entre l’art et l’artisanat. Tout comme pour les dessins et les motifs de ses feutres, il cherche plutôt la conciliation entre l’ancien et l’actuel, et fait apparaître des liens entre des formes et des symboles, archaïques ou vernaculaires, qui resurgissent dans notre modernité.

De dimensions variables, les feutres se retrouvent parfois pris et assemblés dans de grandes toisons, une sorte de zoochorie riche d’histoires en devenir. Parfois encore, ils sont d’un seul tenant, longs de plus de dix mètres, car l’artiste réagit aux échelles des lieux où il travaille : exposé dans une forêt, par exemple, le feutre sera monumental. Autrement, sa vie et sa pratique itinérante l’incite à ramasser et à transporter avec lui – comme une collection de poche, qu’il pose et dispose selon les contextes – des petits objets et fragments : os, savon, terre cuite, métal, bois, marbre, grès, peaux de brebis, chardons…

Andréanne Béguin

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