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Amine Habki

body guard 1 | 2022 | Amine Habki

Marelle Rajel | 2022 | Luciano Ortiz

MidiMinuit | 2021 | Amine Merhoum

De l'autre côté | 2021 | Amine Habki

Né en 2000 à Nantes.
Vit et travaille à Paris.

Diplômé de École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy.

De ses premiers dessins filandreux, Amine Habki a conservé la texture et l’a transposée en volume et en matérialité avec des fils de laine, dans des installations mêlant broderie artisanale et peinture sur toile de jute. Au fil des expérimentations plastiques, sa pratique a débordé les catégories artistiques traditionnelles. Émancipée des supports classiques d’une peinture ou d’un dessin, elle s’est saisie de filets de foot et d’objets textiles industriellement produits, en émergeant progressivement du mur pour tendre vers le sculptural.

Hybrides dans leurs formes et leur plasticité, ses installations le sont aussi dans leurs inspirations, leur esthétique et leur représentation. Entre les empreintes intimes de motifs orientaux puisés dans la chaleur conviviale des réunions de famille, l’iconographie du primitivisme, du romantisme italien et des ornementations persanes, son langage esthétique est un foisonnement, haut en couleur. Cet héritage méditerranéen commun est pourtant fragmenté en une pluralité de signes, symboles, métaphores et allégories. S’appropriant leur puissance de circulation, Amine Habki, par des croisements, fait émerger des interprétations peu explorées, manie son punch needle au service de réécritures volontairement anachroniques, où les mythes religieux et culturels fondateurs volent en éclat au contact de la modernité.

Du kouros au gladiateur en passant par le Rajel, il s’applique à détricoter les archétypes de de la virilité et la performance de la masculinité, pour mieux laisser apparaître des récits alternatifs, esquisser un spectre renouvelé de valeurs. Plutôt que des matériaux nobles et monochromes comme le marbre ou le métal, il incarne ces représentations masculines et prône leur vulnérabilité dans des matières molles, flexibles, fragiles, que sont les tissus et la laine. Il les déploie sur des objets domestiques comme des rideaux ou des tapis, et les anime par des couleurs chatoyantes, acidulées et saturées. À cela s’ajoute également un détournement des artefacts de la virilité : l’artiste brode directement sur des objets-témoins comme des gants de foot ou un punching-ball cotonneux, qui appelle l’enlacement plus que la frappe.

Le corporel se dissout dans l’ornemental : la silhouette d’un homme se fond dans les voûtes d’une porte, les abdominaux deviennent des motifs géométriques abstraits. Anatomie et architecture fusionnent pour créer de nouveaux temples et de nouvelles icônes.

Chaque œuvre recèle un micro-récit situé, une bribe de sa quête identitaire et de sa quête du désir. On y devine un prolongement de sa propre chair. Sans visée autobiographique pour autant, le travail d’Amine Habki met en scène des alter ego, et les effeuille. Il les dépersonnalise et les fond dans des schémas référentiels plus génériques, qui font enfin place aux corps manquants, aux corps manqués et aux corps marginaux. Par des complémentarités chromatiques, des impressions en négatif, en jouant avec le recto et le verso des œuvres, Amine Habki donne à voir les variations et contrastes d’une intériorité en construction.

Andréanne Béguin

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