Née en 1981 à Fons-sur-Lussan
Vit et travaille à Marseille
Formation : esadMM (anciennement ESBAM), Marseille (1999 - 2004)
Supports utilisés : Pratiques mixtes
En prenant au maximum ses distances avec l’espace du white cube, Clémentine Carsberg construit, imagine et recompose des espaces familiers, domestiques ou monumentaux. Il s’agit pour l’artiste de rendre possible la singulière appréciation d’une architecture et de ses sous-entendus.
Comme l’explique Anaël Marion dans son texte rédigé pour le catalogue De vestiges en vertiges : « elle fait véritablement entrer (le motif) sur scène pour l’amener à témoigner ». C’est en effet ce que propose l’artiste en 2017 lors de sa carte blanche au Pavillon Vendôme à Aix en Provence. En travaillant sur un jeu d’« anachronismes spatiaux », elle nous propose une plongée dans l’architecture et la décoration classique de l’hôtel particulier aixois par le biais du contemporain.
Ce faisant, l’artiste semble isoler de l’extérieur les regardeurs qui habitent ses oeuvres. Elle nous immerge dans le revers de la tenture, là où l’on peut voir les coulisses et ce qui est littéralement ob-scène (hors scène). L’image des planchers et parquets flottants que l’artiste réalise au sein du centre d’art 3 bis f à Aix-en-Provence et de la galerie HO à Marseille font apparaître un univers pictural par la contorsion de notre corps, sa réduction de l’autre côté du miroir faisant écho aux pérégrinations d’Alice dans un pays aux ambivalentes merveilles.
Cet isolement se retrouve dans l’usage que l’artiste fait de l’objet comme du matériau pour décomposer ou recomposer l’espace. Ainsi on retrouve dans l’oeuvre Les portes à portes, visible dans une chambre de l’hôtel particulier provençal, ce retour de l’objet à travers son accumulation. En encollant sur les murs de la pièce treize portes de tailles et d’apparences similaires à celle qui permet réellement de s’extraire du lieu, l’artiste perturbe notre perception de la salle en utilisant l’objet même qui nous permet d’en sortir. À partir de cet objet transitif, d’entrée ou de sortie, comme de la forte symbolique du chemin qu’il trace, elle produit un effet décoratif, englobant et déroutant. Il y aurait alors dans les interventions de Clémentine Carsberg une volonté de replier l’objet et le modèle sur son usage, à l’image d’une pratique qui permet de signaler (et de déranger) un espace familier par la singularité de l’ambigu.
Par Léo Guy-Denarcy