Irène Billard, artiste du 60è Salon de Montrouge, nous relate son expérience, de la sélection pour exposer au Salon de Montrouge, jusqu'à la vente aux enchères des oeuvres.
Un collectionneur converse avec un galeriste.
De ce dialogue jaillit une ribambelle de noms de jeunes artistes.
C’est alors que l’un des deux prononce une phrase magique qui orientera littéralement la discussion par la suite : « J’ai découvert son travail à Montrouge. »
Je dis ceci pour l’avoir vécu. « Faire Montrouge » c’est faire partie d’un peloton de jeunes artistes. « Avoir fait Montrouge », c’est donc faire désormais partie d’une grande famille qui ne vous quitte plus, reconnue aux yeux de tous dans l’art contemporain.
Le Salon de Montrouge est donc une expérience mémorable. Quel luxe en tant que jeune artiste d'avoir quatre à cinq techniciens disponibles quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre juste pour soi durant toute la durée du montage et même après. Ici tout le monde apprend à se connaître très vite. Prenez un air hagard, plantez-vous au milieu du décor et un organisateur, technicien ou médiateur arrivera vers vous dans la seconde en vous demandant : « – Puis-je t’aider ? » (…) j’en suis restée sans voix.
Tout démarre sur les chapeaux de roue dès la réception début janvier de cet email jubilatoire commençant par : « Nous avons le plaisir de vous annoncer que votre candidature a été sélectionnée pour le 60e Salon de Montrouge et ce parmi près de 3 000 dossiers. »
Une organisation menée à la baguette par toute l'équipe. Visuels, textes, catalogue, communication autour de l'événement, rencontres… Mieux vaut être focus et ne pas prévoir de partir en vacances au cours des cinq mois de préparation.
Puis durant toute la durée du Salon, c’est le défilé.
Les plus belles rencontres se font dans les premiers jours. Tout s’enchaine très vite : pré-vernissage, presse, institutions, vernissage officiel, annonce des lauréats, conférences, nouvelles rencontres, projets à venir, échanges, ventes. Les collectionneurs font leur repérage, les galeristes partent à la découverte de nouvelles têtes. La plupart se connaissent ou se reconnaissent. Chacun dégaine son iphone, les noms sur les cartels sont photographiés, la fiche note se remplit. Chaque artiste reste disponible en restant non loin de ses pièces pour pouvoir parler de son travail à tout moment. Les discours sont rodés, les conversations sont fluides et les échanges agréables. Les jours passent. Les habitants de la ville s’hasardent à y passer une tête, curieux de savoir ce qui se passe chez eux. Ils y restent d’ailleurs plus longtemps que prévu, heureux d’avoir eu la chance de converser avec de jeunes artistes avenants et sympathiques.
Un mois intense qui s’achève sur une soirée de clôture magistrale où tout le monde danse et se lâche, même les plus inhibés.
Six mois plus tard, c’est l’heure des coups de marteau.
Ceux du commissaire-priseur à l’allure élégante, tapant d’un coup franc pour scander la cadence de la Vente aux Enchères. Une vente qui se veut avant tout être accessible à tous, l’idée étant de se faire plaisir avec une oeuvre originale d’un artiste exposé lors de cette édition.
Chaque coup de marteau approuve le prix définitif à laquelle l’oeuvre partira. Là encore tout va très vite. Mieux vaut savoir à l’avance ce que l’on souhaite acquérir, la main prête à jaillir en l’air. Le téléphone sonne, les collectionneurs s’affairent, la pression monte.
Certains artistes assistent timidement à la vente, regroupés dans le fond de la salle, unis dans une gêne commune.
J’étais la dernière à passer. Avec une pièce conçue spécialement pour l’occasion et que je continue depuis. Les collectionneurs seraient là ? C’était donc le moment de s’adresser à eux directement. De là est née l’idée de ma performance « Bonne Nuit ».
La présentation de ma pièce était enregistrée sur fichier audio. Silence dans la salle. On diffuse cet enregistrement de ma voix racontant le protocole : je propose de me rendre au domicile du collectionneur lui lire une histoire à son chevet une demi-heure avant qu’il ne s’endorme (récit que j’invente à partir de trois mots qu’il m’aura donnés en amont). La performance étant éditée en pièce unique, l’heureux acquéreur repartira avec un DVD, l’histoire imprimée sur papier et un souvenir cocasse.
À priori mon concept ne laisse pas les gens insensibles. Un léger brouhaha parcourt la salle. On entend des rires. Certains tentent par tous les moyens de rester de marbre, Madame étant assise juste à côté. D’autres se retournent pour chercher un support dans le regard des autres. Les plus hardis, venus seuls, s’empressent de lever le doigt pour enchérir. Mais c’est au téléphone que la vente se conclue. Qui donc est cette personne au bout du fil, prête à jouer le jeu de se faire lire une histoire à l’heure du coucher ?
Trente minutes s’écoulent avant qu’on me révèle enfin le nom de ce mystérieux collectionneur au téléphone. …A.M.I B.A.R.A.K. lui-même, désigné pour prendre la relève en tant que futur commissaire d’exposition de ce Salon de Montrouge dès l’année suivante, pour la soixante et unième édition.
Alors pour répondre à ces questions qui vous brûlent déjà : Les trois mots choisis par notre Cher Ami Barak étaient : Peu, Assez, Beaucoup ou Less Is More
Oui ! j’ai eu la chance de voir Ami Barak en pyjama.
Oui ! il s’est endormi.
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